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Quand
j'avais cinq ans, je m'ai tué 1981, collection Point-Virgule (Seuil)
Un roman d'amour. Raconté
par un garçon de huit ans, qui dérange et bouleverse...
Gil, victime de la bêtise des adultes qui transforment
ses rêves en symptômes cliniques, et son amour en
attentat. A cause de ce qu'il a fait à Jessica, il se
retrouve à la résidence Home d'Enfants "les Pâquerettes".
Une histoire à rire et à pleurer, dans une langue
merveilleusemnt préservée.
J'attendais Popeye qui passe après le
Journal. Il a les poignets plus gros que les gens et il
est tellement fort qu'il gagne toujours au fïnish. Mais
le Journal voulait pas s'arrêter.
Mon papa il le regardait. Moi je m'avais mis les mains
sur les oreilles pasque le Journal ça me fait peur. Ça
me plaît pas comme télévision. Y a les Russes qui vont
nous enterrer. Y a le président des Etats-Unis qui est
chauve. Y a les grands moments du fabuleux salon de
l'auto de cette année, que j'y suis même allé une fois
et ça, ça m'a plu comme chose à faire.
Un monsieur du Journal est venu. Il avait quelque chose
dans sa main, une poupée, et il l'a levée en l'air. (Ça
se voyait bien que c'était pas une vraie personne à
cause des coutures.) J'ai enlevé mes mains.
- Ce que je vous montre là, il a dit le monsieur, c'était
le jouet préféré d'une petite fille. Et ce soir, à
cause d'un accident stupide, cette petite fille est morte.
Je suis monté dans ma chambre en courant.
J'ai sauté sur mon lit.
Je m'ai enfoncé la figure dans mon oreiller et je l'ai
appuyée fort, fort, très fort jusqu'à ce que j'entende
plus rien du tout. J'ai arrêté de respirer.
Et puis mon papa est venu et il a enlevé l'oreiller et
il a mis sa main sur moi et il a dit mon nom. Je pleurais.
Il s'est penché et il a passé ses mains sous moi et il
m'a soulevé. Il a fait comme ça, comme il fait à mes
cheveux, et j'ai posé ma tête sur lui. Il est très
fort.
Il m'a dit tout doucement :
- Là, là, fiston, tout va bien, pleure pas.
- Je pleure pas, j'ai dit, je suis un grand garçon.
Mais je pleurais. Alors mon papa m'a dit que tous les
jours il y a des gens qui deviennent morts et que
personne sait pourquoi. C'est comme ça, c'est les règles.
Et puis il est redescendu.
Je suis resté assis sur mon lit très longtemps. Assis,
comme ça, longtemps, longtemps. J'avais quelque chose de
cassé à l'intérieur, je sentais ça dans mon ventre et
je savais pas quoi faire. Alors je m'ai couché par terre.
J'ai tendu le doigt avec lequel faut pas montrer et je
l'ai appuyé contre ma tête. Et puis j'ai fait poum avec
mon pouce et je m'ai tué. [...]"
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